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| Les fées du crépuscule | |
| | Auteur | Message |
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Uriak Louveteau
Nombre de messages : 55 Age : 42 Localisation : La tour des ombres Date d'inscription : 08/10/2007
| Sujet: Les fées du crépuscule Sam 13 Oct - 0:54 | |
| Je vais poster à la suite de ce sujet mon oeuvre la plus récente, sorte de feuilletton à base de mini récit de 2 à 3 pages, sur des personnages particuliers.
En attendant si je devais résumer mes projets passés et futurs, je dirai qu'il quatre à 5 romans inachevés, que je compte plus desosser qu'autre chose (je ne reprends jamais un texte abandonné) une poignées de récits de SF, mais rien de très abouti, en vérité. Mais ça m'a laissé me forger un style qui m'est propre et que je tente d'appliquer au mieux dans mes nouveaux écrits.
Pour voir mon seul (et peut être pour un moment) texte publié, allez voir "retour au sources" dans L'univers 5 d'Outremonde
Rendez-vous plus tard pour la description des idées que je nourris, et la série de textes annoncée.
Attention version plus récente des textes disponible! Chronique des fées
Dernière édition par Uriak le Lun 26 Mai - 11:10, édité 5 fois | |
| | | Uriak Louveteau
Nombre de messages : 55 Age : 42 Localisation : La tour des ombres Date d'inscription : 08/10/2007
| Sujet: Re: Les fées du crépuscule Sam 13 Oct - 18:55 | |
| Scène I : C'est une clairièreC'est une mélodie légère, aux notes fraîches et à l'accent un peu triste. Je ne sais plus depuis combien de temps je l'entends, mais le temps n'importe plus vraiment. Mes sens brouillés ne me sont plus utiles, mon esprit lui n'est déjà plus que pensées chaotiques. Je ne peux pas me mouvoir, alors j'attends dans la fraîcheur de la clairière, les jambes engourdies et les bras ballants. Je me meurs. Je peux voir la Lune et la lune me regarde. La nuit aurait pu être belle, mais une dernière nuit n'est-elle pas toujours belle ?Qui est-elle ? Je ne l'ai pas vu venir, le chant m'a mené à elle, à cette flûte argentée et si longue qui luit entre ses doigts. Je ne crois pas aux anges, et les anges ne portent pas de tels vêtements. L'immaculé de sa peau se perd dans des cheveux de jais, vagues ondulantes agitées par la brise nocturne. Un voile noir lui couvre le corps et le bas du visage et pourtant elle joue de son instrument, comme si de rien n'était, comme si je n'étais déjà plus. « Qui êtes-vous? » Tu quittes ce monde et tu penses que c'est la question à poser ? Tu songes à tout autre chose en vérité.Un reste de lance traverse ma chair et me cloue au sol. Je péris en guerrier comme j'ai vécu et tué moi-même. Alors pourquoi lui mentirais-je ? La mélopée se fait plus pressante, le temps me manque, le temps nous manque. « Que voulez-vous ? » Voilà une excellente demande.Enfin elle lève les yeux et me regarde. Mais je ne la dévisage pas. Je n'ai pas envie de croiser les yeux d'une telle créature, pas quand je viens d'en apercevoir les ailes, grandes et si fragiles, des ailes d'insecte aux nervures sombres. Ce n'est pas un ange qui vient à mon secours, c'est une fée, une fée noire. Pars-tu l'âme en paix, toi le guerrier ? Parle donc tant que la Lune nous regarde. Parle donc ,car je suis la dernière à pouvoir t'entendre.« J'ai versé beaucoup de sang, aujourd'hui comme hier. Je ne suis pas sûr que mourir ainsi suffise... » Tu as quelque chose pour moi et moi je peux t'offrir un répit que nulle confession ne te donnera.Elle est si proche maintenant. Ses yeux brillent d'une impatience mal contenue et pourtant je n'ai plus peur. Les fantômes ne sont pas si pressés, eux qui ont l'éternité devant eux, et puis je n'ai que mon âme à vendre désormais. Sa chevelure caresse mes jambes inutiles, et je sens sa présence comme je sentirai un courant d'air frais. Offre moi... ton dernier souffle. Et ton âme sera sauvée de toutes les salissures passées.Voilà le marché. Je me sens soulagé. Je n'aime pas cette fin qui me semblait promise. Périr dans cette clairière silencieuse, entouré de cadavres tel un juge des profondeurs. Je ne suis rien de toute cela, je suis comme eux et n'avait pas à droit à un repos rapide et indolore. Oui, la fée, je t'offre ma vie. Accepte donc ce baiser et profite d'un dernier voyage.Elle ôte ce voile et me dévoile ses lèvres violacées. Je n'ai plus de force mais elle, cette envie si peu contenue l'anime. Elle m'enlace dans une étreinte vive, presque brusque, alors que nos bouches se mêlent. L'heure est venue et je souffle, souffle jusqu'à l'arrivée des ténèbres... -- L'homme gît à ses pieds, dans l'herbe humide et brillante. Elle sent le premier spasme agiter sa poitrine, tendre ses jambes, secouer ses entrailles. Sa toux est caverneuse, sèche, douloureuse. Des larmes perlent sur ses joues au rythme de la fumée sombre qui s'échappe à petites bouffées. Ses ailes vibrent et noircissent de plus belle. C'est presque agenouillée qu'elle extirpe enfin ce qui reste du mal. Tu n'es vraiment pas raisonnable.Une mélodie légère s'élève, aux notes fraîches et teintée de malice. Celle qui vient drapée d'une robe rouge sombre la tire d'une belle harpe dorée. D'un pas gracile, elle se rend au pied du récent cadavre. Ses doigts caressent la plaie et amènent le sang à ses lèvres. Une moue satisfaite accueille ce breuvage. Il y a pourtant des nourritures bien plus consistantes. Sans compter le coup de fouet qu'une mort brutale vient leur apporter. Pourquoi te donnes-tu toujours ce mal ?Elle s'approche et offre une main secourable à son amie épuisée. S'ensuit l'étreinte que peuvent s'offrir deux amies quand l'une est en peine. Les ailes cendrées laissent une trace sombre sur les mains de la fée rouge qui n'en a cure. Soudainement, la fée noire saisit son visage et fixe ses yeux mordorés. Je tente de rester comme au premier jour, Carmine. Le sang n'est pas pur, qui sait où il te mènera à le boire avec tant d'imprudence ? Ne t'inquiète pas pour moi, c'est à toi que je songe.Carmine se libère dans un soupir. Toutes deux dirigent le regard vers les cieux et l'emplissent de la pale lueur nocturne. Nous regardons la Lune... Et la lune nous voit.C'est une clairière fraîche et humide. Si on y tend l'oreille, on peut encore entendre deux mélodies, aux notes un peu triste, mais teintées de malice.
Dernière édition par le Sam 13 Oct - 18:56, édité 1 fois | |
| | | Uriak Louveteau
Nombre de messages : 55 Age : 42 Localisation : La tour des ombres Date d'inscription : 08/10/2007
| Sujet: Re: Les fées du crépuscule Sam 13 Oct - 18:56 | |
| Scène II : Au premier sang
L'attente se fait longue, mes pensées s'égarent dans la clairière, attirées par les reflets dorés du feuillage, les mystérieuses profondeurs du sous-bois, le bruissement du vent dans les arbres. Je fais un rêve éveillé, bercé par une étrange musique qui semble provenir des hauteurs, un air aux notes légères et malicieuses. Mon sang bouillonnant se refroidit à l'approche du crépuscule, au fil de cette journée qui n'en finit pas. Peut-être ne viendra-t-il pas ici, dans ce recoin de nature. Peut être ce soir ne sera-t-il pas celui de ma mort.
« Ha vous voilà, seul, comme entendu. J'ai bien cru ne jamais vous trouver dans ce bois infernal. Vous n'auriez pas osé vous déshonorer, n'est-ce pas ? »
Sa voix réveille la colère que j'avais apaisé. Je serre la garde de mon épée de plus belle, en proie à cette envie animale d'en finir avec cet homme. Il le sent, je le sais, il le lit dans mon regard et me renvoie d'un rictus narquois à ma propre impuissance.
« Mais qu'entends-je ? Vous avez amené quelqu'un, un musicien venu accompagner votre fin d'un petit requiem de circonstance ? Présentez-le moi, au moins. »
La musique s'est faite plus présente, insistante, moins irréelle. Je lève les yeux vers la frondaison à la recherche de sa mystérieuse source, sous le regard impatient de mon ennemi. Quelqu'un se dissimule non loin de nous, j'en ai la certitude.
« Hola, montrez-vous, le musicien ! Que faites-vous ici ? » Finement observé, jeune homme. Mais ne devrais-je pas vous retourner la question ?
La musique s'est tue et nous restons figés au son de cette voix légère, comme descendue du ciel. Et puis elle se montre à nous, jeune femme vêtue d'une robe cramoisie, les cheveux roux noués de rubans. Elle s'installe nonchalamment sur une souche, laissant voir une belle harpe cuivrée.
Le soleil vous regarde, vous qui comptiez régler votre querelle en solitaires. En cette si belle soirée, m'accepteriez-vous pour arbitre ?
Je me sens mal à l'aise et m'apprête à protester, mais mon cher rival ne m'en laisse pas le temps. Dégainant son arme, il me défie avec sa morgue usuelle.
« Pourquoi pas, ma belle, cet éternel épris de justice pourra constater que je ne fais pas usage de félonie au cours de ce duel. » Ha, vous me plaisez bien. Que le duel commence !
Me voilà pris au piège. Je ne suis même pas en garde que déjà, je dois esquiver une fente de mon adversaire, qui se contente de gratifier mes protestations d'un sourire féroce. Nos lames s'entrechoquent brièvement sous les rayons dorés du crépuscule, tandis que le chant s'élève à nouveau, vivace et inquiétant.
Cesserez-vous au premier sang ? J'ai une idée amusante, que pensez-vous de vous prêter à un jeu en ma compagnie ?
D'un coup d'oeil je regarde l'inconnue qui nous scrute de son regard brillant, tirant de ses mains habiles sa mélodie entêtante. Suis-je le seul à me méfier d'elle, cette inconnue qui me paraît si peu humaine ?
Le gagnant sera celui qui m'offrira le sang de son adversaire, laissez-vous porter par mon chant et donnez donc un beau spectacle. « Quelle est cette folie ? Pourquoi devrions-nous vous obéir, notre affaire n'est pas la votre et je n'ai nulle envie de me prêter à vos demandes sordides ! »
Son rire cristallin se perd dans les replis de son ample collerette. Sans cesser de jouer, elle se tourne dans ma direction tandis une qu'ombre s 'étire dans son dos, interminable et menaçante. Des ailes, d'immenses ailes d'insectes, voilà ce que cachait cette créature, les ailes d'une terrible fée rouge !
Pourquoi ? J'aime être servie, mais je peux tout à fait aller quérir ce que je veux en personne.
La messe est dite. La mort dans l'âme, je me remets en garde. L'instant est tragique. Sous le dernier regard du soleil nous mettons à nouveau nos vies en jeu. Nos fers se croisent, s'évitent, cherchent les chairs sans les trouver. Les cordes vibrent de plus belles, hâtant nos gestes de leurs notes, poussant nos coeurs à s'enhardir. La chanson accélère encore et toujours, elle efface toute fatigue et toute peur. Les pointes d'acier s'approchent, déchirent nos vêtements en vain. Nulle goutte de sang n'est encore tombée. Soudain la sonate s'achève dans une ultime envolée. Le crépuscule nous baigne d'une lumière rougeâtre, moi et mon cher ennemi. Ma lame a percé son bras et la sienne ma jambe. Je me sens étrangement serein, quand son visage trempé de sueur grimace de peur. Sans demander son reste, le lâche détale dans les profondeurs obscures de la forêt, me laissant à terre, la cuisse trempée de sang vif.
Voilà enfin mon présent, vous fûtes parfaits, parfaits, vraiment.
Vive comme l'éclair, la fée s'est penchée sur moi et palpe ma blessure. Je profite de son inattention pour l'observer plus en détails et découvre ainsi ses yeux mordorés, captivés par l'épaisse tâche brunâtre sur mon pantalon. Rapidement, elle écarte le tissu et découvre la plaie. Tant de sang s'écoule, et pourtant sa présence m'apaise.
Nous ne pouvons laisser ça ainsi.
Elle trempe un doigt dans le flot carmin, puis ses lèvres. Je ris intérieurement de ma naïveté. Ma vie s'écoule dans la gorge de cette créature et je me laisse emporter par le flot. Dans mon agonie je crois entendre à nouveau un air enchanté si proche et si différent, trop amer pour être celui de cette voleuse de sang. Ma main s'égare dans ses cheveux, tandis que l'obscurité me happe.
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Comme une enfant prise en faute, Carmine s'écarte et trébuche sur l'homme affaissé. Du dos de la main, elle essuie maladroitement le sang de ses lèvres. Telle un spectre, la fée noire se dresse dans les derniers rayons du jour, sa toge noire secouée par le vent. De sa flûte argenté monte une mélodie accusatrice, une mélopée funèbre.
Mais quand cesseras-tu ? Je te découvre chaque jour plus cruelle, Carmine.
Elle se dirige vers le moribond de son pas léger, dardant son regard sombre sur sa soeur apeurée qui s'écarte à reculons, pour la laisser ausculter le duelliste. Les yeux baissés, la fautive savoure la dernières gouttes de son repas.
Il va s'éteindre. Est-ce toi qui l'a tué ?
La fée noire agrippe la coupable, découvre ses habits maculés, cherche ses prunelles fuyantes. Son index pointe le ventre gorgé de sang.
Jusqu'où te mènera ton appétit ? Vas-tu laisser longtemps ton ventre te dicter ta conduite ?
Contre toute attente, Carmine se fend d'un sourire.
Le tien crie famine, ma pauvre Obsidiane, et près de nous un innocent se meurt. Sers-toi, plutôt que de laisser la faim ternir ton humeur.
Obsidiane vacille, hésite alors que sa soeur à son tour l'enserre, ailes rouges contre ailes cendrées.
Le soleil n'est plus, va, puisque personne ne nous regardera. Toi et moi ne faisons que suivre les traces de la mort, nous ne la précédons pas.
Tu me mens, Carmine, ho, comme tu me mens.
Sa harpe à nouveau en main, la fée rouge en tire une poignée de notes espiègles. Déjà son esprit songe au fuyard, égaré dans les bois.
Les plus beaux mensonges sont ceux auxquels on a envie de croire.
D'un battement d'ailes, elle disparaît dans les hauteurs. Au coeur de la nuit naissante s'élève un chant joyeux et cruel. | |
| | | Uriak Louveteau
Nombre de messages : 55 Age : 42 Localisation : La tour des ombres Date d'inscription : 08/10/2007
| Sujet: Re: Les fées du crépuscule Sam 13 Oct - 18:57 | |
| Scène III : Averse
Enfin ! Enfin tout ceci va se terminer, comme je l'ai toujours su ! Le roulement des explosions s'éloigne peu à peu de moi, le claquement bref des fusils s'éteint. Restent la plie sur mon visage, la boue froide qui couvre ma tunique, mon casque trop lourd, mes viscères brûlantes. J'ai envie de m'affaler par terre, de partir comme au seuil de la nuit, m'endormir. Dormir sans crainte, oui, c'est presque émouvant. Je n'ai plus peur, pour la première fois depuis si longtemps.
J'ouvre un oeil. Toujours cette terre creusée par les pelles, creusée par l'averse, creusée encore, par les obus. Elle est sale et noire, je la déteste. Une gigantesque tombe, toujours ouverte, toujours affamée, qui nous engloutit tous. Juste vengeance pour ce que nous lui faisons. Mieux vaut en finir dans l'obscurité, au son de la guerre qui ne fera plus rage pour moi.
J'entends comme une voix triste, une voix inhumaine. Un air de musique. J'en ai déjà entendu quand j'assistais à des concerts, avant... avant tout cela. Presque de circonstance. Une flûte qui s'obstine dans le tumulte, le bruit de la mitraille et les cris des autres mourants. Je ne dis pas un mot. Je n'ai pas envie qu'on me trouve, qu'on tente de me garder en vie, malgré tout ce que j'ai déjà du laisser ici.
Carmine, Carmine, où te trouves-tu ?
Je n'ai pas rêvé. Cette voix qui s'approche, elle est trop présente, trop étrange pour que je puisse l'imaginer de moi-même. Mes yeux s'entrouvrent à nouveau, ah que cette agonie est longue !
Tu es là, je le sais, montre-toi, Carmine, montre-toi vite !
Cette silhouette qui approche... bien trop fine pour appartenir réellement à ces lieux. Même les plus maigres se retrouvent couvert d'un barda bien vite aussi crasseux que cette boue omniprésente. Nous finissons-tous par nous rassembler à la tranchée. Jusqu'au dernier jour.
Mais où es-tu ? Pourquoi ? Pourquoi s'être aventuré ici, Carmine ?
Je peux l'apercevoir, à présent. Ses longs cheveux noirs flottent malgré l'averse qui s'acharne sur nous. Elle ne marche pas, elle avance, tout simplement, sans toucher ce sol meurtri. Si c'est un ange, cette Carmine a bien de la chance.
Carmine ! Mais qu'étais-tu devenue ? Que t'arrive-t-il ?
Il y a une autre présence, comment n'ai-je pu pas la remarquer ? Je distingue un voile rouge sang, répandu à terre. L'étoffe avait du être belle, avant d'être maculée de boue et ou pire encore. Mon ange s'approche du manteau, qui frémit brusquement. Une courte plainte s'en dégage.
Que fais-tu là ? Tu es venue, venue pour moi ?
Stupide soeur, bien sûr que c'est pour toi ! Mais qu'es-tu allée faire dans cette horreur, cet endroit devenu fou ? J'entends les hommes mourir sans bruit à des lieux à la ronde, des morts fauchés dans l'innocence, hurlants de terreur ? Il n'y aucune âme à sauver ici, Carmine, il n'y a plus rien !
J'aperçois enfin son visage. Elle pleure, en serrant celle qui était à terre. Mes entrailles me font mal, jamais la mort n'a été si proche et pourtant je me sens davantage lucide.
Je me suis trompée... j'ai mal, Obsidiane. J'ai peur. Nous ne sommes pas seules.
Je sais, ma pauvre Carmine, je sais. Vous pouvez parler, vous qui n'avez plus guère de temps. Allez !
Je vacille. A gestes lents je dégage mon casque ruisselant de pluie. Qu'il était lourd ! Je me sens serein, alors que tant de peine m'entoure.
« Êtes vous un ange ? »
Non, mais je puis sauver votre âme. Voulez-vous que je vous fasse quitter cet enfer ?
Elle s'approche de moi et me fixe de ses yeux tristes, trop tristes pour ceux d'un ange. J'aperçois l'autre, le visage terreux, étendue au sol. Je comprends maintenant, je vois ses ailes, sales et inutiles. Je ne suis pas le seul à l'agonie.
« Me faire quitter cet enfer ? Vous avez quelqu'un d'autre à sauver. »
Vous avez beaucoup souffert....
« A la mort. Je les ai envoyé à la mort, durant des jours, des semaines. Des petits gars, presque mes enfants. Vous entendez, vous entendez ces cris ? Le tonnerre des mitrailleuses qui tuent sans jamais de repos ? Ils savaient, je savais, mais ils y allaient quand même. La peur nous rend fous, tous, mais pas innocents. Non, laissez-moi mourir seul, laissez-moi avec mes souvenirs. Laissez-moi un peu de dignité. »
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Obsidiane file sous l'averse couleur de suie, de toute la puissance de ses ailes cendrées. Contre son sein, une fée gémissante. Cette terre n'est plus sienne, elle n'est que désespoir. Cette guerre prend les vie bien trop vite, aveuglément. Elle n'en a jamais connu de telle.
Obsidiane... le sang. Le sang était... Le sang était empoisonné. Il y a une vapeur, Obsidiane, une vapeur qui tue et brûle. J'ai mal.
Je t'emmène loin d'ici, soeurette. Tout ira bien. Tout ira bien.
Tu ne m'en veux pas ? Tu avais raison, Obsidiane, je suis punie pour tout ce que jai fait, je vais...
Arrête, je t'en prie.
La nuit s'achève. Au loin, le claquement des fusils répond au roulement des obus. Un chant cruel et sans joie.
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| | | Uriak Louveteau
Nombre de messages : 55 Age : 42 Localisation : La tour des ombres Date d'inscription : 08/10/2007
| Sujet: Re: Les fées du crépuscule Sam 13 Oct - 18:58 | |
| Scène IV : Brouillard
J'aime la brume qui se lève les soirs humides, j'aime la voir déployer ses nappes blanches dans les petites ruelles tristes. Un peu de magie revient, berçant les réverbères de son aura subtile, caressant les ombres, étouffant les rumeurs de la ville. Elle éveille d'ancien souvenirs, alors que tout un peuple s'égare dans les ténèbres, êtres craignant le jour ou les regards, beautés fugaces, prédateurs affamés.
Tout se passe de travers, que vais-je devenir ?
J'entends des pas hésitants, perdus dans le brouillard épais. Sans réellement y songer, j'avance en leur direction, vers ce rideau grisâtre qui nous baigne et nous étrangle. Je rabats ma veste, l'air est froid. Mes mains pâles sont engourdies, mais qu'importe, mes pensées sont déjà ailleurs. Elles sondent un autre temps, plus simple que celui-ci. De cette époque m'est revenu un air que je sifflote, inconsciemment.
Je ne reconnais plus rien. Trop mal. Je suis encore loin de chez moi...
Les pas sont irréguliers, traînants, comme absorbés par cette brume qui m'entraîne et m'anime. Nous allons nous rencontrer, j'en ai la certitude. Je me dirige vers cet écho, à vive allure, tandis qu'une sensation familière s'empare de moi. Ce frémissement que j'accueille avec délice, ce feu qui s'allume dans mon coeur.
Je peux les entendre. Sont-ils encore à ma recherche ? Je n'arrive plus à avancer.
Mon air s'achève, j'avale à grandes gorgées l'air humide et frais. Je viens de le trouver, étendu contre un mur, la main crispée sur son ventre maculé de sang. Ses yeux hagards perdu dans un visage raviné par la fatigue et la douleur, cherchent les miens. Un simple instant, la surprise efface en eux cette lueur que je connais déjà si bien, cet éclat morbide que j'ai déjà croisé à d'innombrables reprises.
Qui... qui êtes-vous ? Une femme ?
Je m'approche sans un mot, un sourire aux lèvres, fascinée par sa blessure. Victime d'une bagarre ou d'une vengeance entre vauriens, certainement. Je le fixe du regard, m'empare avec douceur de sa main, sans qu'il ne m'oppose de résistance. Le sang est là, sombre et luisant.
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Carmine reprend son souffle à l'ombre protectrice d'un bosquet. Son manteau gît à terre, libérant enfin ses ailes emprisonnées. Sa poitrine luit sous la caresse de la lune, mouchetée de sang, mille petites éclaboussures de vie et de mort. Somnolente, elle s'arrache peu à peu des bras de l'ivresse. Oui, décidément le brouillard lui rappelle d'autres temps.
Ceux d'une jeune novice, hésitante face à ce guerrier moribond. L'homme ne gémit pas, son regard sombre foudroie la créature qui vient d'arriver. L'aura farouche qui émane de son corps musculeux la pétrifie. Mais pourtant plane sur eux d'eux la présence ténue de la mort, une présence qu'elle ne connaît encore guère, une présence qui l'appelle pourtant, lui donne la force de s'approcher du vaincu. Comme si une force ancienne, bien trop ancienne pour qu'elle la connaisse, retentissait dans son coeur. Ce soir, la fée va se repaître d'une âme et débuter réellement son existence entre les mondes.
Sa grande soeur l'avait accompagnée jusqu'à l'orée du bois, lui offrant son doux sourire pour tout encouragement. Ce n'était pas réellement sa première fois, en vérité. Mais l'âme d'un véritable combattant, d'un meurtrier, n'était pas celle d'un innocent. Les souvenirs barbares, les coups, la fureur s'y trouveraient mêlés. Elle pouvait déjà les ressentir, une sensation qu'elle ne trouvait pas si déplaisante. Elle ne sut trop comment, mais ce soir là, quelque chose s'éveilla elle, un sentiment qu'elle apprendrait à chérir et à craindre à la fois. Elle n'avait d'yeux que pour les plaies de ce mourant. Ce soir là, la jeune fée prit goût au sang.
Obsidiane avait blêmi en découvrant ses habits maculés. Une belle robe blanche et pure, une tenue digne d'une novice prometteuse. En ces temps-là, sa soeur aussi allait de blanc vêtue, patiente guérisseuse des âmes perdues. Un ange. Les larmes aux yeux, elle l'avait guidée jusqu'aux anciens, trop pure, et honnête pour tenter de cacher la faute. Les mots avait jailli, furieux, noués par la rage et déception. Des mots pour blesser.
« Maudite ! Tu étais la lumière dans cet âge si sombre et te voilà couverte de honte ! Sais-tu qui se nourrit ainsi de sang, jeune folle ? Les insectes, la vermine minuscule qui bourdonne et harcèle les animaux et les hommes. Est-ce cela que tu veux devenir ? Un misérable insecte suceur de sang ? Disparais ! File hors de notre vue, pour peut-être méditer sur ce que tu as fais ! »
Carmine lâcha un soupir. Elle n'avait pas pu vraiment comprendre, ni regretter. Au fil des jours, elle tenta de s'intéresser aux âmes mais c'était peine perdue. Cette soif nouvelle s'aiguisait rapidement, lui ouvrant les portes de subtils arômes. Tout ce que ces gens avaient vécu, ce qu'ils étaient réellement, tout cela jaillissait de leur sang vermeil, si amer, si doux selon les circonstances. Ces insectes, qu'ils méprisaient et haïssaient, avaient raison. Ainsi, la stupeur, l'incompréhension, se muèrent rapidement en orgueil, en une joie sauvage et libre, celle d'une fée rebelle au destin sanglant.
Son manteau enveloppa à nouveau ses ailes sagement repliées. Carmine frissonna. Au loin, peut-être même dans cette ville endormie, se trouvait sa soeur. Sa soeur si triste depuis ce jour lointain. Elle avait fuit pour la retrouver. Depuis son visage n'avait plus connu la joie, et l'ange n'était plus que cendres.
Tu n'étais pas obligée, grande soeur... Si tu ne m'avais pas choisie, moi, je n'aurais pas été triste de te voir ainsi déchue. Tu m'aimais trop. Je ne suis qu'un insecte affamé, ma soeur. Je ne te méritais pas.
La brume se dissipait, laissant place à l'éclat tranchant de l'astre nocturne. Carmine essuya une larme. Salée. Comme le sang. | |
| | | Uriak Louveteau
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| Sujet: Re: Les fées du crépuscule Sam 13 Oct - 18:59 | |
| Scène V : Au bord du gouffre
J'avais compris au premier regard qu'elle possédait ce que j'avais cherché en vain au cours de ma pitoyable carrière, ce parfum subtil qui se dérobait entre mes doigts à chaque tentative de le capturer. Pour les autres, elle semblait ne pas être là, juste filer comme le font les courants d'air, frôler quelque instant leurs existence sans lier connaissance avec quiconque. Et pourtant, ce port de tête, ce regard ne me laissaient aucun doute. Elle n'était pas des nôtres. Je me trompais, bien sûr, mais j'avais bel et bien trouvé ce spleen, cette délicate atmosphère que je tentais de dépeindre depuis des années.
André, tu me fais grise mine ce matin. Sentirais-tu la fin trop proche, ou suis-je la cause de quelque soucis ?
Je souris brièvement en guise de réponse. Dans ces yeux s'agite cette lueur que je lui connais désormais, petite flammèche joyeuse dansant à la surface de ses sombres pupilles. Je l'aime. Je l'aime parce qu'elle semble toujours marcher d'un pas léger au bord de l'abîme, glisser dans les eaux froides de la tristesse sans s'y dissoudre. J'ai une brusque envie de la saisir, de la garder tout contre moi, la protéger contre le monde. Mais ce serait aller contre sa nature, contre la mienne, aussi. Elle est forte, bien plus que moi, en vérité.
« Pardonne- moi. Je te trouve radieuse aujourd'hui Même si je sais bien que je ne dois pas m'y fier, laisse-moi y croire un peu. »
Te faut-il de l'inspiration pour continuer ? Je n'ai pas joué pour toi depuis longtemps.
Elle sort cette longue flûte d'argent de l'étui de velours noir qu'elle a toujours sur elle. J'hésite. Je la trouve si distante quand ses lèvres s'animent pour en tirer d'envoûtantes mélodies. Ce soir j'ai envie qu'elle soit réellement là, dans mon monde et non le sien, celui qui teinte son regard de joie. Poliment, je refuse. Pour masquer mon trouble, je m'empare de la bouteille posée sur ma table.
« Sais-tu comment on surnomme l'absinthe ? La fée verte. Ne trouves-tu pas ça amusant ? »
Tu as l'impression de voir la mort dans cette boisson. Comme tu la vois en moi.
« Vous la côtoyez toutes les deux, oui. Comme les deux versants d'un même abîme. J'ai encore peine à réaliser que moi, qui n'ai jamais pu faire surgir la mort, dans toute sa force, de mon art, moi donc, puisse en avoir l'incarnation devant moi. Presque offerte. »
Et l'attends-tu davantage, maintenant que tu me connais ? Je n'arrive toujours pas à te comprendre, mais sans doute saurais-je quand l'heure sera venue.
« Alors trinquons à la mort. J'espère qu'elle sera aussi belle que toi. Ne te l'a-t-on jamais dit ? »
Elle a dénudé ses épaules, laissant ses cheveux de jais caresser sa peau pâle. Ses ailes étendues recouvrent mon lit de leur motifs cendrés. Ici, elles ont toute la place nécessaire, elles peuvent vivre, battre, profiter de la liberté. Obsidiane m'a dit les cacher aux hommes le reste du temps. Quel supplice. Ce que je vois, seuls les mourants peuvent le voir. Peut-être est-ce vraiment ça, marcher au bord de l'abîme, pouvoir le contempler sans chuter, pour quelques instants encore.
D'ordinaire, je ne me montre aux yeux de hommes qu'au seuil de la mort. Ils n'ont pas à me connaître avant ce dernier instant. Mais les temps changent. Je vais et je viens au coeur des foules, dans ces cités bruissantes de vie. La beauté que tu me prêtes, ne le confondrais-tu pas avec celle d'une femme, André ? Ne te trompes-tu pas en cherchant ma compagnie ?
Je fais erreur, peut-être. C'est même très probable. Pourtant, si c'est moi qui l'ait abordée, cette figure emplie d'une triste beauté, c'est elle qui m'a suivie. Jusqu'à me parler de la mort qui m'enivre et m'attire. Celle dont je ne me lasse pas de chercher le regard.
« Obsidiane... Depuis tout ce temps, je cherche un sens à cette existence que je sais finie. La peur, Obsidiane. La terrible peur du néant, de la fin. La peur de ne pas pouvoir faire, écrire, dire ce qu'on a à transmettre avant le dernier plongeon, sans fond ni issue. Jamais elle n'a été si proche, seulement tu seras là, je le sais, tu m'attendras. Je t'offrirais alors mon dernier soupir et tu sauveras ce qui peut l'être. Comment peux-tu me faire confiance à moi qui voudrais tant dire, tant peindre, pour garder le silence et ce secret normalement offert aux moribonds ? C'est ce que moi je ne parviens toujours pas à comprendre. »
Il y a des hommes qui cherchent à savoir, à comprendre sans pour autant avoir besoin de partager leurs découvertes. Souvent, la joie de rencontrer la vérité illumine leurs visages quand j'apparais et m'adresse à eux. Ils savent et acceptent de partir dans la sérénité.
« C'est le choix entre laisser ou emporter son savoir avec soi. Les deux sont tout aussi défendables. Si je veux laisser quelque chose, je dois encore avancer, Obsidiane. Le terme est proche, trop proche. »
Je saisis mes pinceaux, respire profondément pour dissiper le trouble de l'alcool. Ses vêtements traînent, épars, au pied du lit. Comme depuis le début de ce tableau, je peux la contempler, pâle et délicate, telle que j'aimerais la laisser sur la toile quand je serais redevenu poussière. Elle doit sentir mon regard la parcourir, suivre les marques noires, ce lierre couleur d'encre qui grimpe le long de ses bras, étreint sa poitrine et son ventre, prolonge les courbes, capte et détourne mon attention.
« Sont-ce les péchés que tu avales qui marbrent ainsi ta peau, Obsidiane ? Les mêmes qui noircissent tes pensées ? Je n'arrive pas à le croire, ce motif est trop délicat, on dirait l'oeuvre d'un peintre ou d'un tatoueur. »
Ce sont les marques d'une longue histoire. Je ne vais pas déflorer tous les mystères, André, je n'en ai pas envie et toi non plus, n'est-ce pas ? Je préfère te laisser le plaisir d'imaginer.
« Oui, comme nous avions convenu. Je... »
Elle a fermé les yeux. Je dois reprendre l'ouvrage. Je la toucherai jamais que du regard. Mais je connaîtrai ses lèvres au soir de mon trépas.
--
Et bien ? Tu sembles bien affligée, grande soeur. Je n'ai pourtant rien fait pour te déplaire.
Non, Carmine. J'ai juste... perdu quelqu'un.
Ne le faisons-nous pas tous les jours ? Nous n'avons pas le temps de connaître quelqu'un avant de l'accompagner d'en la mort. De goûter à son trépas, oserais-je dire.
Le rire de la fée rouge retentit, clair et presque innocent.
Oui. Nous n'avons jamais le temps... | |
| | | Uriak Louveteau
Nombre de messages : 55 Age : 42 Localisation : La tour des ombres Date d'inscription : 08/10/2007
| Sujet: Re: Les fées du crépuscule Sam 13 Oct - 18:59 | |
| Scène VI : Petit Cercle
Les constructions de pierre surgirent enfin de l'épaisse forêt qui s'était enracinée envers et contre tout, accrochée à son flanc de montagne battu par les vents marins. Elle tentait de survivre malgré les hommes, ou plutôt selon leur souhait, songea Obsidiane, sans illusion sur la liberté offerte à la nature en ce nouveau temps. De quelques battements d'ailes, elle se glissa dans la frondaison et se retrouva face aux murs à demi écroulés. L'air était frais et humide au pied des résineux, parfumé d'embruns et des senteurs du bois. Une cachette agréable pour ce pays trop ensoleillé à son goût. La fée cendrée se faufila jusqu'au coeur du vieil édifice : une petite cours ombragée, envahie d'herbe folles. Elle la trouverait là, probablement.
Carmine, ma petite soeur écarlate, c'est un bien joli repaire que tu as trouvé là.
Un lourd silence l'accueillit en guise de réponse. Obsidiane ne voyait d'elle que sa silhouette allongée dans l'herbe fraîche. Connaissant sa soeur, elle décida d'insister.
J'ai pensé que tu aimerais me revoir. Après tout, tu es parvenue à te tenir à l'écart des hommes et de leurs villes. N'es-tu pas contente ?
A l'écart des hommes, oui. Mais pas de toi. Tu me retrouves toujours, même quand je ne te cherches pas ta compagnie. Pourquoi tu y arrives alors que j'en suis incapable, je l'ignore. Mais tu y parviens où que je me trouve.
Obsidiane accusa le coup, surprise par le ton glacial de sa soeur. Carmine s'était levée et lui tournait ostenciblement le dos. Ses cheveux dorés flottaient librement, plus long qu'à l'accoutumée, et sans les subtils entrelacs qu'appréciait d'ordinaire y nouer la fée écarlate.
Rien à dire ? Tu me regardes comme si tu croisais une inconnue, grande soeur. Tu es bien capable de ressentir ma présence en n'importe quel lieu, ça oui, mais ressentir ce dont j'ai envie ou besoin, pas le moins du monde. Et bien sache que j'ai besoin de calme. De profiter de cet endroit. Seule.
As-tu remarqué ? soupira Obisdiane. Auparavant, les hommes évitaient les endroits morts, abandonnés, ou ne venaient y prendre qu'un peu de pierres pour leurs propres demeures. En cachette, souvent avec crainte. Et maintenant ils s'y précipitent, pour les voir, comme attirés par les senteurs du passé. Ce refuge que tu as trouvé est vraiment exceptionnel.
Raison de plus pour me laisser en profiter. Je suis lasse de vivre dans les villes, de fuir des forêts ouvertes à tous. Je suis heureuse, à l'abri des regards. Cesse de venir m'apporter ton éternel désespoir et ta pitié envers moi.
Obsidiane ne répondit pas. Fuyant le regard de sa cadette, elle observa le décors qui les entourait. L'apparente tranquillité de cette enceinte en ruines cachait des détails plus malsains. Elle vit les touffes d'herbe noircies, les marques et les impacts sur la pierre, les nombreux éclats fraichements arrachés. Troublée, elle se décida à affronter le visage fermé de Carmine.
Que se passe-t-il ici, petite soeur ? Pourquoi ces traces de lutte dans ton repaire, à quoi t'adonnes-tu ?
Ha, l'heure du sermon arrive. C'est pour ça que tu es venue me retrouver pour espionner ma conduite ? Mais que te faut-il ? Tu aurais voulu me surprendre toute ensanglantée et me faire la leçon ? Je n'ai plus de règles à suivre, j'ai acceptée de partir et de quitter tout ordre qu'on voulait m'imposer. Tu me considères comment ? Comme une fée, comme ta soeur ou un monstre ?
Je te considère comme une fée se prenant pour un monstre, une fée qui lacère de coup sa cage, poussée par la colère qu'elle ne maîtrise pas. C'est bien cela, Carmine ? Je ne te reconnais plus.
Les pupilles de Carmine s'amincirent, lui conférant un air animal. Ses ailes frémirent et s'agitèrent , tourbillons écarlates. Les traits d'Obsidiane se figèrent brusquement en une expression plus sévère tandis que sa soeur se faisait plus menaçante.
Tu ne prends plaisir qu'à me gronder ! Tu crois que je suis toujours une petite soeur sans défense ?
Oui. Je le crois toujours.
Carmine s'élança en trombe sur son ainée, dans un vrombissement aigu. Au dernier instant, cette dernière lui agrippa les poignées et la stoppa net dans sa course rageuse. Les ailes couleur nuit d'Obsidiane se déployèrent, enserrant sa cadette de leur ombre. Sa colère se mua en panique quand elle se sentit écrasée par cette force obscure. Pantelante, la fée rouge se retrouva à terre, saisie de tremblement incontrôlables.
Tu pleures ? Montre-moi les marques, Carmine. Montre-moi ton sceau régal. Maintenant !
Comme elle ne voyait pas soeur réagir, la fée noire s'empara du col de sa soeur et la tira brutalement à hauteur de son visage. Le tissu écarlate de déchira d'un bruit sec, dévoilant le motif rouge sang. Obsidiane contempla longuement le spectacle, effleurant du bout des doigts la chair secouée de frissons.
--
Pourquoi ? Pourquoi m'écrase-t-elle de sa présence, me rend-elle minuscule à ce point ? Obsidiane, je te sens si chétive, si peu vivante à chaque entrevue. Comment peux-tu dissimuler une telle force, après tout ce temps ? Je suis passée par pire que toi, j'ai du prendre tant de risque pour mener mon existence, assouvir ma soif. Mais quand tu es-là, je peux sentir cette différence absolue, infranchissable qui nous sépare. Je ne serais jamais ton égale, jamais.
Sèche donc ces larmes, petite soeur. Tu n'es pas un monstre, même si tu aimes parfois te sentir ainsi. Tu dois être terriblement seule, petite écarlate. J'aurais du m'en apercevoir bien plus tôt.
Je ne peux pas retourner au sein des cercles féeriques. Et je ne le veux pas.
Il y a longtemps que je voulais te dire quelque chose, mais je pensais qu'il valait mieux que tu l'ignores. Depuis des décennies, je ne les perçois plus, Carmine. Leur présence s'est lentement affaiblie avec la montée de l'homme, les cercles se faisaient de plus en plus lointain. Même si j'ai choisi de t'accompagner en exil, jamais je n'ai perdu le contact. Jusqu'à ce dernier siècle. Les cercles ont disparu, les fées ne sont qu'un souvenir. Je n'ai plus que toi, petite soeur, et tu n'as plus que moi, tu comprends ?
Seules... Obsidiane ne pourra plus jamais retrouver les cercles. Par ma faute. Je pensais qu'elle me suivait pour se consoler de ses propres faiblesses. J'attendais le jour où elle cesserait enfin de s'infliger du mal en restant avec moi. Elle les a senti disparaître... sans les rejoindre. Et moi je n'ai pas changé.
Que vas-tu faire maintenant, Obsidiane ?
Ne voudrais pas tu former un cercle avec moi ? Un petit cercle de fées ?
Grande soeur, nous ne sommes pas assez pour former un cercle, nous devrions être trois, quatre, cinq fées ou davantage !
Obsidiane ébouriffa les cheveux de sa soeur.
Tu as raison. Mais je peux toujours me tromper, n'est-ce pas ? | |
| | | Uriak Louveteau
Nombre de messages : 55 Age : 42 Localisation : La tour des ombres Date d'inscription : 08/10/2007
| Sujet: Re: Les fées du crépuscule Ven 16 Mai - 22:10 | |
| Les passages précédents ont été corrigés et sont disponibles ici
Ombre de Lune
Les deux hommes peinaient et soufflaient, trop lourdement chargés pour emprunter ce sentier enneigé. L'air vif des montagnes sifflait sans discontinuer, harcelant leurs jambes engourdies malgré d'épaisses bottes de fourrure, rougissant leurs visages, mordant le moindre carré de chair exposée. Un ennemi implacable, un compagnon qu'ils connaissaient bien, dont ils toléraient d'ordinaire la présence. Mais qu'importe, désormais ils étaient riches, et le réconfort d'une auberge les attendait dans la vallée.
Soudain l'un d'entre eux s'arrêta pour désigner une étrangeté sur le chemin, une silhouette presque immobile, dressée dans la neige, quasiment indiscernable sous le manteau blanchâtre qui la recouvrait, si ce n'était quelques reflets métalliques révélés par le soleil levant. Les deux voyageurs approchèrent avec prudence, jusqu'à distinguer convenablement la mystérieuse personne. Celle-ci rabattit sa capuche de fourrure, pour révéler un fin visage cerné de cheveux immaculés. La surprise figea un instant les montagnards découvrant les traits de la jeune fille qui ne semblait nullement incommodée par le froid.
« Vous êtes perdue, mademoiselle ? » osa l'un d'entre eux d'une voix forte pour percer le vent. Un sourire illumina le pâle visage de l'inconnue.
Je suis bien contente de vous voir.
--
Je ne sens quasiment plus rien. La lune fait briller la neige d'un éclat presque irréel, ce blanc dur et bleuté qu'on ne découvre que par les nuits de temps clair. Je n'irai pas plus loin. Le froid engourdit lentement mes mains crispées en vain. Je ne peux plus rien faire. Tout ce que j'ai bâti est réduit à néant, alors à quoi bon s'accrocher à la vie ? Je vais retourner à la montagne. Seul. Peut-être quelqu'un comprendra-t-il en me retrouvant au dégel. Au printemps prochain, je l'espère. Sinon ma carcasse ira aux charognards. A cette idée, un dernier spasme de rage se fraye un chemin dans ma gorge engourdie.
« Je vous attendrai dans la mort, vous m'entendez ! La montagne a tout vu, elle sait autant que vous et moi, elle vous attendra ! »
Moi aussi, j'attendais de telle paroles.
« Qui est là ? » ma voix s'enroue, encore épuisée par mon cri de colère. Je sens la douleur revenir alors que je me redresse pour apercevoir celle qui vient de me parler. Rien. Cet éclat uniforme, scintillement nocturne des cristaux gelés. Et poutant, l'évidence doit être là, sous mes yeux. Je n'ai plus le temps de jouer aux devinettes.
« Que désirez-vous de-moi ? Allez-vous m'aider ? »
En quelque sorte. Je désire savoir ce que tu désires.
Ce que je souhaite ? En finir, je pense. Il n'y a plus rien à souhaiter. J'avais cru pouvoir vivre une vie à l'écart des passions de ce monde, sur ma cime si tranquille. Mais c'est à croire que le monde m'a rattrapé. Tous mes sacrifices ne m'auront valu que des ennuis. Et à présent, je meurs, et je parle à la neige.
« Je veux partir et tout oublier. »
Sans vouloir t'assurer de quoi que ce soit ?
La neige a frémi, non loin de moi ; vivante, elle m'observe. Un froid glacial m'envahit soudain, un froid imaginaire qui me transperce et vrille mon coeur. Je reste comme suspendu, en proie à la surprise. Et puis je les devine, ces pupilles qui m'observent, attentives et inhumaines. Ce ne sont pas elles qui me mettent au supplice, loin de là. Je m'inflige moi-même ce tourment.
« Pourquoi ? ». Je suppplie l'être du regard, pour qu'il mette fin à cette absurde agonie.
Laisse venir ce que tu t'efforces de taire. Sinon, tu n'auras jamais de repos.
La lune m'écrase de sa présence silencieuse. Le gris vient se mêler à ses crêtes blanches, comme cette colère qui tente de s'évader. Je voulais rester digne, mais digne envers qui ? Je ne peux pas me tromper moi-même. Je les hais. Ils sont venus détruire mon paradis, abbatre ma demeure et ma famille, pour récupérer le fruit de mes efforts. Mon coeur explose d'une joie morbide, maintenant que je me complais dans ce sentiment si limpide.
« Vengeance... »
J'arrive...
La neige a laissé place à une frêle jeune femme, apparition blâfarde aux cheveux d'argent. J'oscille entre la peur et l'espoir, à la vue de cet ange venu me confesser. Je la laisse me saisir les mains et les poser dans les siennes, froides mais rassurantes. D'étranges médailles miroitent à son cou et dans sa chevelure, lisses et sans ornement. Son visage se rapproche, un beau visage aux traits assurés, mais sans émotion. Elle n'est que reflets.
Confie-moi ce que tu voulais cacher. Vas-y si tu crois encore en la Justice.
Ses lèvres pâles s'approchent des miennes, prêtes à recevoir ma colère, mon désespoir. Dans son dos sagitent deux grandes ailes à son image, piquetées de métal acéré. La lune m'envoie son messager vengeur. Alors je l'attire brusquement et lui offre un baiser terrible, un baiser de mort et de rage.
--
La neige formait un écrin autour de la silhouette étendue au sol. L'homme aurait pu n'être qu'endormi, si des traces de violences n'avaient pas strié son corps inerte. Pourtant, un sourire habillait son visage grisâtre. Elle pouvait encore sentir le dernier soupir sur ses lèvres, et ne put réprimer un frisson. Ses ailes cliquètèrent et frémirent, précédant ses pensées. Sélène laissa une larme s'échapper de ses yeux clôts. Le choc était plus terrible que d'ordinaire, puissant, chaud, légèrement amer.
Son regard décendit sur les flancs de la montagne. Là, dans les brumes glaciales de l'hiver, se cachaient les pillards. Les assassins. Son coeur battit soudain d'impatience, tandis qu'un sentiment familier l'inonda. D'une poussée, Sélène s'élèva pour fendre l'air nocturne. Une longue plainte se perdit dans le ciel, de celles qui gèlent le sang des hommes. La montagne garderait les cadavres.
--
Une foule curieuse s'agitait au pied de la falaise. Oubliant le froid matinal, chacun venait prendre sa ration de plaisir malsain, son quart d'heure d'effroi, en contemplant les cadavres. Deux malandrins bien connus, ayant vécu et morts sans honneur. Les corps avaient étés comme brisés par la chute, battus à mort par un vent devenu ennemi. On se signa en découvrant les visages, figés dans la surprise et dans l'horeur.
A terre luisaient des pièces échappées de leur flanc, mais nul n'osait y toucher. De l'argent bien mal gagné, certainement. | |
| | | Khellendros Loup sanguinaire
Nombre de messages : 144 Age : 39 Localisation : Région parisienne Date d'inscription : 03/05/2007
| Sujet: Re: Les fées du crépuscule Lun 26 Mai - 8:57 | |
| Salut Uriak ! Avec ton post du 16 mai, je découvre complètement ce topic ! Je me permets de te donner mon ressenti de lecteur brut de décoffrage, le plus objectivement possible. - Citation :
- Scène I : C'est une clairière
C'est une mélodie légère, aux notes fraîches et à l'accent un peu triste. Je ne sais plus depuis combien de temps je l'entends, mais le temps n'importe plus vraiment. Mes sens brouillés ne me sont plus utiles, mon esprit lui est-ce qu'il ne faudrait pas mettre des virgules pour accentuer ici ? Ou reformuler ? ex : quant à mon esprit, il n'est déjà plus... n'est déjà plus que pensées chaotiques. Je ne peux pas me mouvoir, alors j'attends dans la fraîcheur de la clairière, les jambes engourdies et les bras ballants. Je me meurs.
Je peux voir la Lune et la lune pourquoi plus de majuscule la deuxième fois ? me regarde. La nuit aurait pu être belle, mais une dernière nuit n'est-elle pas toujours belle ? j'accroche pas tellement la dernière phrase
Qui est-elle ? Je ne l'ai pas vu venir, le chant m'a mené à elle proposition bizarre alors qu'on sait qu'il ne peut plus bouger , à cette flûte argentée et si longue qui luit entre ses doigts. Je ne crois pas aux anges, et les anges ne portent pas de tels vêtements. L'immaculé de sa peau se perd dans des cheveux de jais, vagues ondulantes agitées par la brise nocturne. Un voile noir lui couvre le corps et le bas du visage et pourtant elle joue de son instrument, comme si de rien n'était, comme si je n'étais déjà plus.
« Qui êtes-vous? » Tu quittes ce monde et tu penses que c'est la question à poser ? Tu songes à tout autre chose en vérité.
Un reste de lance traverse ma chair et me cloue au sol. Je péris en guerrier comme j'ai vécu et tué moi-même. Alors pourquoi lui mentirais-je ? La mélopée se fait plus pressante, le temps me manque, le temps nous manque.
« Que voulez-vous ? » Voilà une excellente demande.
Enfin elle lève les yeux et me regarde. Mais je ne la dévisage pas. Je n'ai pas envie de croiser les yeux d'une telle créature, pas quand je viens d'en apercevoir les ailes, grandes et si fragiles, des ailes d'insecte aux nervures sombres. Ce n'est pas un ange qui vient à mon secours, c'est une fée, une fée noire.
Pars-tu l'âme en paix, toi le guerrier ? Parle donc tant que la Lune nous regarde. Parle donc ,car je suis la dernière à pouvoir t'entendre. « J'ai versé beaucoup de sang, aujourd'hui comme hier. Je ne suis pas sûr que mourir ainsi suffise... » Tu as quelque chose pour moi et moi je peux t'offrir un répit que nulle confession ne te donnera.
Elle est si proche maintenant. Ses yeux brillent d'une impatience mal contenue et pourtant je n'ai plus peur. Les fantômes ne sont pas si pressés, eux qui ont l'éternité devant eux, et puis je n'ai que mon âme à vendre désormais. Sa chevelure caresse mes jambes inutiles, et je sens sa présence comme je sentirai un courant d'air frais.
Offre moi offre-moi ... ton dernier souffle. Et ton âme sera sauvée de toutes les salissures passées.
Voilà le marché. Je me sens soulagé. Je n'aime pas cette fin qui me semblait promise. Périr dans cette clairière silencieuse, entouré de cadavres tel un juge des profondeurs. Je ne suis rien de toute cela, je suis comme eux et n'avait pas à droit à un repos rapide et indolore. Oui, la fée, je t'offre ma vie.
Accepte donc ce baiser et profite d'un dernier voyage. je n'aime pas trop non plus la première proposition : juste avant, la fée dit "offre-moi", et ici "accepte", on a l'impression que le marché est échangé.
Elle ôte ce voile et me dévoile ses lèvres violacées. Je n'ai plus de force mais elle, cette envie si peu contenue l'anime. Elle m'enlace dans une étreinte vive, presque brusque, alors que nos bouches se mêlent. L'heure est venue et je souffle, souffle jusqu'à l'arrivée des ténèbres...
--
L'homme gît à ses pieds, dans l'herbe humide et brillante. Elle sent le premier spasme agiter sa poitrine, tendre ses jambes, secouer ses entrailles. Sa toux est caverneuse, sèche, douloureuse. Des larmes perlent sur ses joues au rythme de la fumée sombre qui s'échappe à petites bouffées. Ses ailes vibrent et noircissent de plus belle. C'est presque agenouillée qu'elle extirpe enfin ce qui reste du mal.
Tu n'es vraiment pas raisonnable.
Une mélodie légère s'élève, aux notes fraîches et teintée de malice. Celle qui vient drapée d'une robe rouge sombre la tire d'une belle harpe dorée. D'un pas gracile, elle se rend au pied du récent cadavre. Ses doigts caressent la plaie et amènent le sang à ses lèvres. Une moue satisfaite accueille ce breuvage.
Il y a pourtant des nourritures bien plus consistantes. Sans compter le coup de fouet qu'une mort brutale vient leur apporter. Pourquoi te donnes-tu toujours ce mal ?
Elle s'approche et offre une main secourable à son amie épuisée. S'ensuit l'étreinte que peuvent s'offrir deux amies quand l'une est en peine. Les ailes cendrées laissent une trace sombre sur les mains de la fée rouge qui n'en a cure. Soudainement, la fée noire saisit son visage et fixe ses yeux mordorés.
Je tente de rester comme au premier jour, Carmine. Le sang n'est pas pur, qui sait où il te mènera à le boire avec tant d'imprudence ? Ne t'inquiète pas pour moi, c'est à toi que je songe.
Carmine se libère dans un soupir. Toutes deux dirigent le regard vers les cieux et l'emplissent de la pale lueur nocturne.
Nous regardons la Lune... Et la lune nous voit. regarde ?
C'est une clairière fraîche et humide. Si on y tend l'oreille, on peut encore entendre deux mélodies, aux notes un peu triste, mais teintées de malice. J'accroche bien, cette scène est bien intéressante en tout cas ! | |
| | | Khellendros Loup sanguinaire
Nombre de messages : 144 Age : 39 Localisation : Région parisienne Date d'inscription : 03/05/2007
| Sujet: Re: Les fées du crépuscule Lun 26 Mai - 9:16 | |
| - Uriak a écrit:
- Scène II : Au premier sang
L'attente se fait longue, mes pensées s'égarent dans la clairière, attirées par les reflets dorés du feuillage, les mystérieuses profondeurs du sous-bois, le bruissement du vent dans les arbres.énumération un peu hachée à la lecture. Ajouter peut-être un "ou bien encore par" avant le "bruissement" Je fais un rêve éveillé, bercé par une étrange musique qui semble provenir des hauteurs, un air aux notes légères et malicieuses. Mon sang bouillonnant se refroidit à l'approche du crépuscule, au fil de cette journée qui n'en finit pas. Peut-être ne viendra-t-il pas ici, dans ce recoin de nature. Peut être ce soir ne sera-t-il pas celui de ma mort.
« Ha vous voilà, seul, comme entendu. J'ai bien cru ne jamais vous trouver dans ce bois infernal. Vous n'auriez pas osé vous déshonorer, n'est-ce pas ? »
Sa voix réveille la colère que j'avais apaisé. plus haut, on a l'impression que c'est le crépuscule approchant qui apaise cette colère.Je serre la garde de mon épée de plus belle, en proie à cette envie animale d'en finir avec cet homme. Il le sent, je le sais, il le lit dans mon regard et me renvoie d'un rictus narquois à ma propre impuissance.
« Mais qu'entends-je ? Vous avez amené quelqu'un, un musicien venu accompagner votre fin d'un petit requiem de circonstance ? Présentez-le moi, au moins. »
La musique s'est faite plus présente, insistante, moins irréelle. Je lève les yeux vers la frondaison à la recherche de sa mystérieuse source, sous le regard impatient de mon ennemi. Quelqu'un se dissimule non loin de nous, j'en ai la certitude.
« Hola, montrez-vous, le musicien ! Que faites-vous ici ? » Finement observé, jeune homme. Mais ne devrais-je pas vous retourner la question ?
La musique s'est tue et nous restons figés au son de cette voix légère, comme descendue du ciel. Et puis elle se montre à nous, jeune femme vêtue d'une robe cramoisie, les cheveux roux noués de rubans. Elle s'installe nonchalamment sur une souche, laissant voir une belle harpe cuivrée.
Le soleil vous regarde, vous qui comptiez régler votre querelle en solitaires. En cette si belle soirée, m'accepteriez-vous pour arbitre ?
Je me sens mal à l'aise et m'apprête à protester, mais mon cher rival ne m'en laisse pas le temps. Dégainant son arme, il me défie avec sa morgue usuelle.
« Pourquoi pas, ma belle, cet éternel épris de justice pourra constater que je ne fais pas usage de félonie au cours de ce duel. » Ha, vous me plaisez bien. Que le duel commence !Peut-être mettre un point d'exclamation pour la première phrase également...
Me voilà pris au piège. Je ne suis même pas en garde que déjà, je dois esquiver une fente de mon adversaire, qui se contente de gratifier mes protestations d'un sourire féroce. Nos lames s'entrechoquent brièvement sous les rayons dorés du crépuscule, tandis que le chant s'élève à nouveau, vivace et inquiétant.
Cesserez-vous au premier sang ? J'ai une idée amusante, que pensez-vous de vous prêter à un jeu en ma compagnie ?
D'un coup d'oeil je regarde l'inconnue qui nous scrute de son regard brillant, tirant de ses mains habiles sa mélodie entêtante. Suis-je le seul à me méfier d'elle, cette inconnue qui me paraît si peu humaine ?
Le gagnant sera celui qui m'offrira le sang de son adversaire, laissez-vous porter par mon chant et donnez donc un beau spectacle. « Quelle est cette folie ? Pourquoi devrions-nous vous obéir, notre affaire n'est pas la votre et je n'ai nulle envie de me prêter à vos demandes sordides ! »
Son rire cristallin se perd dans les replis de son ample collerette. Sans cesser de jouer, elle se tourne dans ma direction tandis une qu'ombre s 'étire dans son dos, interminable et menaçante. Des ailes, d'immenses ailes d'insectes, voilà ce que cachait cette créature, les ailes d'une terrible fée rouge !
Pourquoi ? J'aime être servie, mais je peux tout à fait aller quérir ce que je veux en personne.
La messe est dite. La mort dans l'âme, je me remets en garde. L'instant est tragique. Sous le dernier regard du soleil nous mettons à nouveau nos vies en jeu. Nos fers se croisent, s'évitent, cherchent les chairs sans les trouver. Les cordes vibrent de plus belles, hâtant nos gestes de leurs notes, poussant nos coeurs à s'enhardir. La chanson accélère encore et toujours, elle efface toute fatigue et toute peur. Les pointes d'acier s'approchent, déchirent nos vêtements en vain. Nulle goutte de sang n'est encore tombée. Soudain la sonate s'achève dans une ultime envolée. Le crépuscule nous baigne d'une lumière rougeâtre, moi et mon cher ennemi. Ma lame a percé son bras et la sienne ma jambe. Je me sens étrangement serein, quand son visage trempé de sueur grimace de peur. Sans demander son reste, le lâche détale dans les profondeurs obscures de la forêt, me laissant à terre, la cuisse trempée de sang vif.
Voilà enfin mon présent, vous fûtes parfaits, parfaits, vraiment.
Vive comme l'éclair, la fée s'est penchée sur moi et palpe ma blessure. Je profite de son inattention alors qu'elle a plus ou moins annoncé qu'elle allait bouffer le perdant ? Est-ce qu'il ne faudrait pas insister sur l'état de sa blessure qui l'empêche de bouger ? Pourquoi n'essaye-t-il pas d'attaquer ?pour l'observer plus en détails et découvre ainsi ses yeux mordorés, captivés par l'épaisse tâche brunâtre sur mon pantalon. Rapidement, elle écarte le tissu et découvre la plaie. Tant de sang s'écoule, et pourtant sa présence m'apaise.
Nous ne pouvons laisser ça ainsi.
Elle trempe un doigt dans le flot carmin, puis ses lèvres. Je ris intérieurement de ma naïveté. Ma vie s'écoule dans la gorge de cette créature et je me laisse emporter par le flot. Dans mon agonie je crois entendre à nouveau un air enchanté si proche et si différent, trop amer pour être celui de cette voleuse de sang. Ma main s'égare dans ses cheveux, tandis que l'obscurité me happe.
--
Comme une enfant prise en faute, Carmine s'écarte et trébuche sur l'homme affaissé. Du dos de la main, elle essuie maladroitement le sang de ses lèvres. Telle un spectre, la fée noire se dresse dans les derniers rayons du jour, sa toge noire secouée par le vent. De sa flûte argenté monte une mélodie accusatrice, une mélopée funèbre.
Mais quand cesseras-tu ? Je te découvre chaque jour plus cruelle, Carmine.
Elle se dirige vers le moribond de son pas léger, dardant son regard sombre sur sa soeur apeurée qui s'écarte à reculons, pour la laisser ausculter le duelliste. Les yeux baissés, la fautive savoure la dernières gouttes de son repas.
Il va s'éteindre. Est-ce toi qui l'a tué ?
La fée noire agrippe la coupable, découvre ses habits maculés, cherche ses prunelles fuyantes. Son index pointe le ventre gorgé de sang.
Jusqu'où te mènera ton appétit ? Vas-tu laisser longtemps ton ventre te dicter ta conduite ?
Contre toute attente, Carmine se fend d'un sourire.
Le tien crie famine, ma pauvre Obsidiane, et près de nous un innocent se meurt. Sers-toi, plutôt que de laisser la faim ternir ton humeur.
Obsidiane vacille, hésite alors que sa soeur à son tour l'enserre, ailes rouges contre ailes cendrées.Ca, ça voudrait dire qu'elles sont dos à dos, non ?
Le soleil n'est plus, va, puisque personne ne nous regardera. Toi et moi ne faisons que suivre les traces de la mort, nous ne la précédons pas.
Tu me mens, Carmine, ho, comme tu me mens.
Sa harpe à nouveau en main, la fée rouge en tire une poignée de notes espiègles. Déjà son esprit songe au fuyard, égaré dans les bois.
Les plus beaux mensonges sont ceux auxquels on a envie de croire.
D'un battement d'ailes, elle disparaît dans les hauteurs. Au coeur de la nuit naissante s'élève un chant joyeux et cruel. | |
| | | Khellendros Loup sanguinaire
Nombre de messages : 144 Age : 39 Localisation : Région parisienne Date d'inscription : 03/05/2007
| Sujet: Re: Les fées du crépuscule Lun 26 Mai - 9:20 | |
| - Uriak a écrit:
- Scène III : Averse
Enfin ! Enfin tout ceci va se terminer, comme je l'ai toujours su ! Le roulement des explosions s'éloigne peu à peu de moi, le claquement bref des fusils s'éteint. Restent la pliela plaie ? sur mon visage, la boue froide qui couvre ma tunique, mon casque trop lourd, mes viscères brûlantes. J'ai envie de m'affaler par terre, de partir comme au seuil de la nuit, m'endormir. Dormir sans crainte, oui, c'est presque émouvant. Je n'ai plus peur, pour la première fois depuis si longtemps.
J'ouvre un oeil. Toujours cette terre creusée par les pelles, creusée par l'averse, creusée encore, par les obus. Elle est sale et noire, je la déteste. Une gigantesque tombe, toujours ouverte, toujours affamée, qui nous engloutit tous. Juste vengeance pour ce que nous lui faisons. Mieux vaut en finir dans l'obscurité, au son de la guerre qui ne fera plus rage pour moi.
J'entends comme une voix triste, une voix inhumaine. Un air de musique. J'en ai déjà entendu quand j'assistais à des concerts, avant... avant tout cela. Presque de circonstance. Une flûte qui s'obstine dans le tumulte, le bruit de la mitraille et les cris des autres mourants. Je ne dis pas un mot. Je n'ai pas envie qu'on me trouve, qu'on tente de me garder en vie, malgré tout ce que j'ai déjà du laisser ici.
Carmine, Carmine, où te trouves-tu ?
Je n'ai pas rêvé. Cette voix qui s'approche, elle est trop présente, trop étrange pour que je puisse l'imaginer de moi-même. Mes yeux s'entrouvrent à nouveau, ah que cette agonie est longue !
Tu es là, je le sais, montre-toi, Carmine, montre-toi vite !
Cette silhouette qui approche... bien trop fine pour appartenir réellement à ces lieux. Même les plus maigres se retrouvent couvert d'un barda bien vite aussi crasseux que cette boue omniprésente. Nous finissons-tous par nous rassembler à la tranchée. Jusqu'au dernier jour.
Mais où es-tu ? Pourquoi ? Pourquoi s'être aventuré ici, Carmine ?
Je peux l'apercevoir, à présent. Ses longs cheveux noirs flottent malgré l'averse qui s'acharne sur nous. Elle ne marche pas, elle avance, tout simplement, sans toucher ce sol meurtri. Si c'est un ange, cette Carmine a bien de la chance.
Carmine ! Mais qu'étais-tu devenue ? Que t'arrive-t-il ?
Il y a une autre présence, comment n'ai-je pu pas la remarquer ? Je distingue un voile rouge sang, répandu à terre. L'étoffe avait du être belle, avant d'être maculée de boue et ou pire encore. Mon ange s'approche du manteau, qui frémit brusquement. Une courte plainte s'en dégage.
Que fais-tu là ? Tu es venue, venue pour moi ?
Stupide soeur, bien sûr que c'est pour toi ! Mais qu'es-tu allée faire dans cette horreur, cet endroit devenu fou ? J'entends les hommes mourir sans bruit à des lieux à la ronde, des morts fauchés dans l'innocence, hurlants de terreur ? Il n'y aucune âme à sauver ici, Carmine, il n'y a plus rien !
J'aperçois enfin son visage. Elle pleure, en serrant celle qui était à terre. Mes entrailles me font mal, jamais la mort n'a été si proche et pourtant je me sens davantage lucide.
Je me suis trompée... j'ai mal, Obsidiane. J'ai peur. Nous ne sommes pas seules.
Je sais, ma pauvre Carmine, je sais. Vous pouvez parler, vous qui n'avez plus guère de temps. Allez !
Je vacille. A gestes lents je dégage mon casque ruisselant de pluie. Qu'il était lourd ! Je me sens serein, alors que tant de peine m'entoure.
« Êtes vous un ange ? »
Non, mais je puis sauver votre âme. Voulez-vous que je vous fasse quitter cet enfer ?
Elle s'approche de moi et me fixe de ses yeux tristes, trop tristes pour ceux d'un ange. J'aperçois l'autre, le visage terreux, étendue au sol. Je comprends maintenant, je vois ses ailes, sales et inutiles. Je ne suis pas le seul à l'agonie.
« Me faire quitter cet enfer ? Vous avez quelqu'un d'autre à sauver. »
Vous avez beaucoup souffert....
« A la mort. Je les ai envoyé à la mort, durant des jours, des semaines. Des petits gars, presque mes enfants. Vous entendez, vous entendez ces cris ? Le tonnerre des mitrailleuses qui tuent sans jamais de repos ? Ils savaient, je savais, mais ils y allaient quand même. La peur nous rend fous, tous, mais pas innocents. Non, laissez-moi mourir seul, laissez-moi avec mes souvenirs. Laissez-moi un peu de dignité. »
--
Obsidiane file sous l'averse couleur de suie, de toute la puissance de ses ailes cendrées. Contre son sein, une fée gémissante. Cette terre n'est plus sienne, elle n'est que désespoir. Cette guerre prend les vie bien trop vite, aveuglément. Elle n'en a jamais connu de telle.
Obsidiane... le sang. Le sang était... Le sang était empoisonné. Il y a une vapeur, Obsidiane, une vapeur qui tue et brûle. J'ai mal.
Je t'emmène loin d'ici, soeurette. Tout ira bien. Tout ira bien.
Tu ne m'en veux pas ? Tu avais raison, Obsidiane, je suis punie pour tout ce que jai fait, je vais...
Arrête, je t'en prie.
La nuit s'achève. Au loin, le claquement des fusils répond au roulement des obus. Un chant cruel et sans joie.
------------------
Pour parler des fées, c'est par ici ! Pour cette scène, je trouve dommage qu'il n'y ait pas plus d'échange entre le soldat et les fées, ou de comparaison entre Carmine et l'homme. Ca doit être dû au passage sur le forum, mais quelques italiques ont sauté. | |
| | | Khellendros Loup sanguinaire
Nombre de messages : 144 Age : 39 Localisation : Région parisienne Date d'inscription : 03/05/2007
| Sujet: Re: Les fées du crépuscule Lun 26 Mai - 9:44 | |
| BrouillardDécidément, se balader ainsi dans le temps en suivant ces fées est bien agréable ! A petits coups de pinceaux, on découvre le background, c'est bien amené. Pour ce texte, je ne suis pas fan des incises en italiques, c'est trop ou pas assez au choix. On se demande bien sûr comment Carmine s'est remise du sang empoisonné, je vais découvrir bientôt si tu réponds à cette question dans la suite des textes ! Au bord du gouffreJe ne suis pas sûr, mais on ne dit pas : "A chaque tentative pour la capturer" ? - Citation :
- « Pardonne- moi. Je te trouve radieuse aujourd'hui Même si je sais bien que je ne dois pas m'y fier, laisse-moi y croire un peu. »
majuscule en trop à "même" Je ne comprends pas trop : l'homme dit qu'Obsidiane est l'incarnation de la mort, mais c'est bien un "personnage" différent, comme le tend à montrer la phrase où il dit qu'il espère qu'elle sera aussi belle que la fée ? - Citation :
- Elle a fermé les yeux. Je dois reprendre l'ouvrage. Je la toucherai jamais que du regard. Mais je connaîtrai ses lèvres au soir de mon trépas.
"Je ne la toucherai jamais" il me semble. Il est bien ce petit paragraphe. Petit Cercle - Citation :
- me retrouves toujours, même quand je ne te cherches pas ta compagnie.
"je ne cherche pas" ostenciblement ==> ostensiblement je crois. - Citation :
- Fuyant le regard de sa cadette, elle observa le décors qui les entourait.
décor Quelques lignes plus loin, tu as un saut de ligne en trop. Ombre de luneArgh, je viens de voir qu'il y avait une version plus récente ! La silhouette du début est décrite comme debout dans la neige mais presque indiscernable. Comme voit-on qu'elle est debout en conséquent ? Excellent tout ça ! J'aime vraiment bien ces textes, on sent qu'il y a quelque chose derrière qu'on a envie de découvrir. En 7 chapitres, tu poses plein de questions, répondant petit à petit. L'introduction de la troisième fée est bienvenue pour éviter l'essoufflement. On se demande comment les trois vont êtres réunies, si elles le seront, etc ! | |
| | | Uriak Louveteau
Nombre de messages : 55 Age : 42 Localisation : La tour des ombres Date d'inscription : 08/10/2007
| Sujet: Re: Les fées du crépuscule Lun 26 Mai - 11:06 | |
| j'allais justement te demander si tu étais parti de la version plus récente pour lire tes posts... Bon du coup, j'attends que tu revoies ça ou pas ? (et il faut que j'édite le premier post) Il a(vait) un topic pour les commentaires, sinon, ce serait sans doute mieux, si je continue la diffusion par ce biais. | |
| | | Khellendros Loup sanguinaire
Nombre de messages : 144 Age : 39 Localisation : Région parisienne Date d'inscription : 03/05/2007
| Sujet: Re: Les fées du crépuscule Mar 27 Mai - 8:04 | |
| Je viens de zieuter le pdf, je n'ai pas fait le tri par rapport à ce que j'ai souligné précédemment, mais en fait, certains ont déjà dû te pointer quelques trucs !! Tu as certains chapitres qui ne sont pas justifiés tandis que d'autres le sont, mais c'est du détail ! De même que certains "--" ne sont pas centrés. Au niveau de la typo, j'ai vu un point d'interrogation accolé à un mot... Comme tu vois, je n'ai pas grand chose à ajouter sinon que j'attends le chapitre 8 !! Désolé de ne pas avoir posté tout ça dans le topic des commentaires, je n'avais pas du tout fait attention à son existence !! | |
| | | Uriak Louveteau
Nombre de messages : 55 Age : 42 Localisation : La tour des ombres Date d'inscription : 08/10/2007
| Sujet: Re: Les fées du crépuscule Mer 28 Mai - 11:08 | |
| Certes la mise en page est je l'avoue le cadet de mes soucis. Et tant pis pour le topic de discussions, enfoui quelques niveau plus bas.
Pour la suite, c'est à voir... je suis très dubitatif sur ce mode de diffusion à vrai dire mais je n'ai pas vraiment d'idées. | |
| | | Khellendros Loup sanguinaire
Nombre de messages : 144 Age : 39 Localisation : Région parisienne Date d'inscription : 03/05/2007
| Sujet: Re: Les fées du crépuscule Jeu 29 Mai - 7:38 | |
| Diffusion par blog ? Y en a qui ont de très beaux skins et layout. D'une part, tu peux mettre tes textes et les illustrations qui vont avec, et d'autre part, tu peux récolter des commentaires. C'est plus simple de linker un blog pour donner à des gens sur la toile que des topics sur des fora je pense. | |
| | | Uriak Louveteau
Nombre de messages : 55 Age : 42 Localisation : La tour des ombres Date d'inscription : 08/10/2007
| Sujet: Re: Les fées du crépuscule Jeu 29 Mai - 8:10 | |
| à condition d'avoir un rythme suffisant, je pense
A l'origine même si le premier chapitre devait être seul, l'idée de se maintenir dans cette taille de chapitres devait aidait à la diffusion. | |
| | | Khellendros Loup sanguinaire
Nombre de messages : 144 Age : 39 Localisation : Région parisienne Date d'inscription : 03/05/2007
| Sujet: Re: Les fées du crépuscule Ven 30 Mai - 8:48 | |
| Si tu te fixes un chapitre par semaine ou tous les 10 jours... Tu as déjà 7 chapitres, ça permet de tenir en écrivant les autres. La taille des chapitres est en effet telle que ce n'est pas un gros pavé qui tombe sur le lecteur, ça aide ! Après, il y a aussi les illustrations que tu fais par exemple que tu peux poster A toi de voir ! | |
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